Jérôme Cuny ; Collaborations : Ali A. Hassanali (The Abdus Salaam International Center for Theoretical Physics, Trieste) et Michele Ceriotti (École polytechnique fédérale de Lausanne, Suisse)
Comprendre les propriétés de l’eau sous ses différentes formes et ses modes d’interaction avec divers systèmes est un sujet d’importance fondamentale dans les domaines de la physique, de la chimie et de la biologie. Par conséquent, un grand nombre de travaux expérimentaux et théoriques ont été dédiés à l’étude de l’eau sous différentes conditions.
Le groupe MAD s’investit largement dans ces études en s’intéressant, en autres exemples, aux agrégats de molécules d’eau et à l’interaction d’hydrocarbures aromatiques polycycliques avec ces molécules. Récemment, nous avons étendu notre expertise aux systèmes aqueux en phase condensée, en particulier à l’eau liquide et aux mécanismes de transfert de proton en solution aqueuse. Voici quelques exemples des travaux récemment réalisés.
Étude du mécanisme de recombinaison acide-base de l’ion carbonate
Malgré leur importance primordiale, les mécanismes de transfert de proton en phase liquide restent mal compris et mal décrits au niveau atomique. Pour pouvoir apporter un éclairage théorique de ces processus, la dynamique moléculaire est un outils de choix puisqu’elle permet de prendre explicitement en compte la dynamique du système, les effets anharmoniques, les effets de température, ... L’objectif du présent travail a été d’étendre les travaux existant à l’étude du mécanisme de recombinaison entre un proton et une base faible.
Nous avons ainsi pu mettre en évidence les points suivants :

1 - Dans toutes les trajectoires menant à une recombinaison acide-base, nous observons la formation d’un complexe réactif comme celui présenté sur la Figure 1. Il est composé de la base, de l’ion hydronium et de deux molécules d’eau.
2 - Pour que la recombinaison ait lieu, de complexe doit subir une compression globale, c’est à dire que les fluctuations locales de densité conduisent à la compression des liaisons hydrogènes entre les molécules d’eau.
3 - Lorsque cette compression globale a lieu, nous observons un transfert concerté de deux à trois protons.
Influence des effets quantiques nucléaires sur les propriétés de systèmes en phase condensée
Les méthodes de dynamique moléculaire présentent certaines limitations, l’une des plus importante étant que les noyaux sont traités de manière classique. Dans le cas d’atomes légers, comme l’hydrogène, cette approximation classique peut se révéler limitée. Ainsi, des approches ont été développées pour inclure les effets quantiques nucléaires (NQE) dans les simulations de dynamique moléculaire. L’une d’elles est la méthode des intégrales de chemins (ou path-integral molecular dynamics, PIMD).

D’un point de vu pratique, l’approche PIMD consiste à simuler en parallèle N répliques du système étudié, chaque réplique étant traitée de manière classique (voir Figure 2). En moyennant les propriétés obtenues pour ces N répliques classiques, on obtient les propriétés du système quantique. Il est important de noter que cette approche permet non seulement d’inclure les effets de l’énergie de point zéro mais également les effets de tunneling et cela, à température finie. Elle va donc bien au delà des corrections de type harmoniques parfois utilisées.¨